
Digimon Story: Time Stranger
Plateforme de test : PS5 Pro
Date de sortie : 3 octobre 2025
Développeur : Media Vision Inc.
Éditeur : Bandai Namco
Style : J-RPG
Disponible sur :
Disponible sur PlayStation 5, Xbox Series et PC Steam, Digimon Story: Time Stranger est le nouveau chapitre d’une série de J-RPG ancrée dans l’univers numérique de Bandai Namco. Ce volet, qui s’inscrit dans la lignée de Cyber Sleuth et Hacker’s Memory, se distingue par sa volonté de mêler narration sombre, systèmes de combat tactiques et progression personnalisée des Digimon. Porté par une direction artistique contrastée et des inspirations claires issues de la scène J-RPG moderne, le titre surprend autant qu’il déroute. Après une dizaine d’heures de jeu, l’expérience dévoile un monde dense, aux mécaniques affinées, bien loin de son image de clone de Pokémon.
Un univers plus sombre que jamais pour Digimon
Dès les premières minutes, Time Stranger impose un ton grave. Une catastrophe temporelle menace l’équilibre du monde, et le joueur incarne un agent dont la mission est d’identifier et stopper ces anomalies. La narration, volontairement fragmentée, joue avec les sauts dans le temps : retour huit ans en arrière, réalités divergentes, personnages qui se souviennent ou non du protagoniste selon la période. Une structure qui évoque sans détour celle de Final Fantasy XIII-2, avec ses lignes temporelles croisées et ses zones à explorer sous différentes versions.
L’univers baignant dans la science-fiction puise aussi dans le registre de l’horreur psychologique. Certains citoyens interprètent les anomalies temporelles comme des phénomènes occultes, voire des apparitions. En réalité, ces « fantômes » sont des formes de vie électroniques : les Digimon. Le récit alterne ainsi entre enjeux personnels (une famille frappée par le deuil) et enjeux plus globaux, flirtant avec la fin du monde. Un équilibre narratif maîtrisé, même si certains personnages secondaires tombent dans la caricature – à l’image d’un animateur de TV aux allures de streamer générique.
L’ambiance est portée par une bande-son envoûtante, omniprésente, qui pose les bases d’un univers à la fois mélancolique et immersif. L’atmosphère sonore transforme chaque lieu – de l’attique du héros aux zones urbaines dévastées – en espace narratif à part entière. Malgré une mise en scène parfois figée, le jeu réussit à captiver grâce à sa tonalité mature et ses thématiques rarement explorées dans l’univers Digimon.
Un système de combat profond et stratégique
Time Stranger repose sur un système de combat au tour par tour bien complet, conçu pour offrir un maximum de liberté au joueur. Chaque affrontement permet d’alterner entre attaques, objets et changements de membres d’équipe sans perdre de tour, ce qui ouvre la voie à des enchaînements tactiques dynamiques. Il devient possible, par exemple, de soigner un allié puis d’attaquer dans la même phase, ou de permuter un Digimon faible juste après avoir exploité la faiblesse de l’adversaire.
Ce système repose sur une double logique : les affinités typologiques entre créatures, et les faiblesses élémentaires. Lorsqu’un Digimon ennemi est vulnérable à la fois au type et à l’élément utilisé, les dégâts infligés peuvent atteindre jusqu’à 300 %, rendant la constitution de l’équipe cruciale dans les combats les plus exigeants. Le jeu encourage à faire tourner constamment ses créatures, selon la configuration adverse, à la manière d’un JRPG stratégique.
La capture s’effectue par un mécanisme original : les données des Digimon ennemis sont scannées au fil des combats. Une fois le seuil de 100 % atteint, ils deviennent convertibles et peuvent rejoindre l’équipe. Attendre 200 % améliore leurs statistiques à la conversion, incitant à prolonger les affrontements pour obtenir des créatures plus puissantes. Cette mécanique évite les traditionnels systèmes de capture à l’ancienne et fluidifie l’intégration de nouveaux alliés.
Chaque Digimon possède plusieurs branches d’évolution, dictées par son niveau, ses affinités et sa personnalité. Le joueur peut influer sur cette dernière à travers des dialogues et des choix, orientant ses créatures vers des archétypes plus ou moins offensifs, défensifs ou équilibrés.
En parallèle, un arbre de compétences pour l’agent permet de débloquer bonus d’XP, buffs passifs ou améliorations spécifiques à certains profils de Digimon. À cela s’ajoute le Digifarm, un espace d’entraînement entre les missions, inspiré des systèmes de simulation comme le Chao Garden ou la Velvet Room, où il est possible d’assigner des programmes de progression personnalisés.
Ces nombreux paramètres dessinent un gameplay dense et gratifiant, qui incite autant à l’optimisation qu’à l’expérimentation. Malgré une prise en main parfois chargée en informations, la courbe de progression se révèle intuitive, soutenue par une interface claire et des raccourcis pratiques, comme le mode auto-battle ou la vitesse x5 en combat. L’ensemble confère à Time Stranger une vraie saveur tactique, tout en respectant le rythme du joueur.
Un RPG à petit budget, mais aux grandes ambitions
À mesure que l’on explore le monde de Time Stranger, les ambitions du projet deviennent évidentes, mais également ses limites de développement. Certaines zones traversées, comme des couloirs de bureaux ou des égouts, trahissent un level design trop rudimentaire qui contraste avec la richesse du scénario. Ces environnements génériques peinent à rendre justice à un univers qui joue avec les paradoxes temporels et les tensions dramatiques, et c’est bien dommage.
La mise en scène, quant à elle, est à géométrie variable avec des moments de grand spectacle et d’autres plus monotones voir ennuyeux. Si certaines cinématiques bénéficient d’une réalisation soignée, d’autres laissent transparaître un budget restreint : animations figées, angles de caméra standards, et absence de synchronisation labiale. Le jeu semble avoir ciblé avec précision les séquences où concentrer ses efforts de mise en forme, au détriment de l’uniformité visuelle.
En revanche, une grande attention a été portée aux Digimon eux-mêmes. Chaque créature dispose de modèles 3D détaillés, de voix dédiées et d’animations uniques en combat. Le soin apporté aux animations d’attaque, aux poses de victoire et à la variété des capacités trahit un investissement ciblé sur le cœur du gameplay. Ces choix artistiques renforcent la lisibilité des affrontements tout en valorisant les créatures numériques comme véritables protagonistes du récit.
L’identité visuelle du titre de Bandai Namco rappelle par endroits celle de Persona 5, notamment dans l’interface, les menus et les choix de mise en scène. Cette inspiration n’est jamais dissimulée, mais plutôt digérée avec justesse pour servir une ambiance propre. Le résultat donne un JRPG hybride, mêlant influence japonaise contemporaine et tonalité nostalgique, qui, malgré ses contraintes de production, parvient à affirmer une signature esthétique cohérente.
Un J-RPG rythmé, riche et immersif
Time Stranger est le titre Digimon qui pourrait bien réconcilier les sceptiques avec la licence. Avec son scénario post-apocalyptique à embranchements, ses combats tactiques fluides et ses systèmes de progression d’une richesse inattendue, le titre de Bandai Namco s’impose comme un RPG bien plus ambitieux qu’il n’y paraît. Si certains environnements manquent de personnalité et que la réalisation alterne entre l’inspiré et l’expédié, le jeu rattrape ces manquements par une implication mécanique constante et un sens du rythme maîtrisé.
Loin du clone des RPG Pokémon qu’on aurait pu redouter, Time Stranger assume une identité bien à lui, à mi-chemin entre Persona, Final Fantasy XIII-2 et les codes classiques du JRPG. Un RPG de niche qui n’a pas peur de viser juste, même avec un budget serré. Une chose est sûre, c’est que cet opus mérite mieux que la comparaison facile. C’est peut-être le meilleur ambassadeur de la série depuis Cyber Sleuth.
Points positifs
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Une histoire mature et bien rythmée
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Un système de combat tactique riche et accessible
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Une progression des Digimon variée et personnalisable
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Une bande-son immersive et soignée
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Un univers original mêlant science-fiction et voyage temporel
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Des animations de combat réussies et doublages convaincants
Points négatifs
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Un level design générique dans plusieurs zones
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La qualité en dents de scie des cinématiques
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Une interface parfois chargée pour les nouveaux venus
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Un manque de variété visuelle dans les premiers donjons
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Des personnages secondaires peu mémorables